Posté le 1 décembre 2019 - par attelagesbovinsdaujourdhui
Moisson avec un bœuf vosgien et le vallus, Fête de Grannos, 11 au 18 Août 2019, par Emmanuel Fleurentdidier
Une grande première depuis plus de deux mille ans. C’est au mois d’Août qu’ont lieu les fêtes de Grannos chez les Lemovices, peuple gaulois du Limousin, sur l’oppidum de Coriobona dans la vallée de l’Issoire.
Coriobona est un village reconstitué, grandeur nature avec une ferme aristocratique fortifiée, où l’on peut découvrir la vie au quotidien des Gaulois lors du I er siècle avant J.-C., celle de l’artisanat, des guerriers et des marchands (Cliquez ici pour voir). C’est avec leur chef Eporenos (Monsieur Boos Patrick) restituteur et de toute la troupe des Gaulois d’Esse que va se dérouler la moisson.
Ce n’est pas la première fois que j’interviens sur ce site puisqu’en automne 2017 avec Solène Gaudin nous avons participé au tournage d’un documentaire « Le vrai visage des Gaulois », où nous avions réalisé un labour à l’araire gauloise, avec deux bœufs vosgiens (Cliquez ici pour voir).
Cette fois-ci, il s’agit de la moisson avec le vallus, la moissonneuse gauloise, dont la représentation a été trouvée en Gaule Belge.
C’est une première pour cette reconstitution avec un bœuf vosgien.
D’autres essais avaient été réalisés avec un cheval ou un âne et même avec des hommes. La réalisation de la moissonneuse n’est pas seulement du folklore « à la gauloise » pour le grand public venu passer la journée sur ce site, mais c’est surtout une restitution grandeur réelle avec deux archéologues, Sammy Benmakhad doctorant archéo-agronome, et Stéphane Gaudefroy, de l’INRAP et céramologue, venus pour l’occasion.
Le vallus a été réalisé par Patrick Boos d’après des sculptures, et de deux textes antiques de Pline et de Columelle.
Le vallus est tout en bois: c’est une caisse avec, à l’avant, un peigne qui vient cueillir les épis d’épeautre, et à l’arrière des brancards dans lesquels on vient loger le bœuf. Ce vallus est connu par les Gaulois dans le nord de la France, en Belgique, et en Allemagne, lieu de grandes cultures où l’on cultive l’épeautre et le millet.
Paradoxalement, c‘est une machine tractée, mais où « l’outil » est devant le boeuf.
A l’arrière, un homme qui tient le vallus règle la hauteur de coupe. A l’avant, un homme rabat les épis vers le peigne.
Cette moisson va se faire avec Tino, bœuf vosgien de quatre ans, dressé au menage en solo par l’arrière. Là, on n’a pas mis la charrue avant le bœuf, mais le vallus.
Il a donc fallu apprendre à Tino à tirer pour pousser l’outil. Lors de la préparation et pour la présentation, je suis aidé par Emile qui sera à la manœuvre du vallus mais aussi par Elian qui sera rabatteur.
Tino est un bœuf qui apprend vite même si la manœuvre est délicate pour lui.
Il faut qu’il tire le vallus pour qu’il avance, qu’il apprenne à le faire tourner et à faire demi-tour sur place. Pour cela, on a fabriqué un vallus d’entraînement, un essieu, une caisse, et des brancards. Le valllus doit être équilibré car le bœuf tire et Emile doit tenir les brancards pour tenir la direction mais n’avoir aucun poids à porter. Tino pousse bien l’outil, il faut maintenant le faire tourner, ce qu’il réalise assez bien, puis faire demi-tour sur place. Après une heure d’entraînement, on sait que Tino va pouvoir réaliser la moisson.
Fin Juillet, Emile, Tino et moi nous nous rendons à l’oppidum de Coriobona, où nous retrouvons Patrick Boos qui va nous montrer le vallus avec lequel nous allons travailler. On garnit Tino puis on le met dans les brancards. C’est Patrick qui se place à l’arrière pour la direction, puis l’on fait marcher Tino. Il effectue des lignes droites et des demi-tours. Tout se passe comme à l’entraînement.
Nous sommes prêts pour la moisson.
Enfin, les grands jours arrivent, les visiteurs sont là en nombre et certains sont venus spécialement pour voir un bœuf travailler, suite à l’annonce faite sur le blog de Michel Nioulou : « Attelages Bovins d’aujourd’hui » (Cliquez ici pour voir).
Après la présentation du vallus et de Tino dans l’hémicycle du village, on se rend dans le champ où l’on doit moissonner l’épeautre, accompagnés des Gaulois du village et des archéologues.
C’est un grand moment de l’Histoire que l’on va reconstituer, avec des gestes autrefois quotidiens que l’on va réaliser dans l’idée de les redécouvrir. Tino est prêt, tout le monde attend ses premiers pas dans le champs. C’est parti, Tino pousse ou tire et Patrick rabat les épis vers le peigne du vallus. Les premiers épis tombent dans la caisse. Le vallus fonctionne, la moisson se déroule comme il y a deux mille ans. On peut voir la satisfaction des reconstituteurs, des Gaulois d’Esse, des archéologues, et de Patrick qui a fabriqué le vallus, des bouviers, qui ont tous le sentiment de vivre une grande première.
Maintenant que l’on sait que ça marche, cette reconstitution permet aussi de faire quelques modifications sur le vallus afin d’améliorer la récolte mais c’est aussi ce qu’ont dû faire les Gaulois de l’époque.
Ces journées étaient plus que de la simple démonstration, elles vont permettre de continuer les recherches et les études à venir, montrer au public le travail de la traction bovine, expliquer le futur à travers le passé. Mais nous sommes « aujourd’hui » , au temps où l’on se pose toutes ces questions sur notre avenir, notre agriculture, nos énergies, nos sols, mais aussi sur notre travail avec les animaux….
La moisson se termine sous les applaudissements du public! Alors merci à tous ces gens d’être venus redécouvrir notre passé, merci à Patrick Boos, aux Gaulois d’Esse, aux archéologues. Merci à Solène Gaudin (Cliquez ici pour voir) pour son travail en amont, à Michel Nioulou pour son blog qui aide à communique. Merci à Tino, premier bœuf à pousser le vallus depuis deux mille ans. Un grand merci à Emile (Cliquez ici pour voir) et Elian (Cliquez ici pour voir) pour les heures de préparation de dressage. Comme toujours chez les Gaulois, c’est avec un banquet que s’achève la fête de Grannos.
Emmanuel Fleurentdidier
Bosognatos « celui qui connaît les bœufs »
Contact :
les Gaulois d’Esse, le pont Binot, 16 500 ESSSE
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